mise à jour : 1 février 2022
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- Introduction

La biologie entre en jeu

Auteur: Yaël Nazé
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Alors qu’il s’agit de discuter la présence de vie, la biologie est curieusement absente des débats jusqu’à l’aube du 20e siècle, laissant les astronomes et les philosophes occuper le premier plan. À la fin du 19e siècle, les choses commencent à changer.

Louis Pasteur (1822-1895) mettant à mal les théories de génération spontanée, certains proposent alors que la vie terrestre vient d’ailleurs (théorie dite de panspermie)... Lord Kelvin (1824-1907) décrit ainsi les météorites comme des fragments de planètes verdoyantes venues féconder la Terre. Se disant que la descente dans l’atmosphère et la collision brutale avec le sol doit détruire la vie dans ces objets, Svante Arrhénius (1859-1927) propose plutôt que les spores présents dans l’atmosphère soient gentiment poussés par la pression de radiation pour finir par ensemencer, sinon l’Univers, tout au moins le Système solaire. Il calcule que des spores terrestres atteignent ainsi l’orbite de Mars en vingt jours, et l’étoile la plus proche en neuf mille ans. Il suppose que les températures glaciales de l’espace interstellaire suspendent le pouvoir de germination de ces « graines » – certains expérimentent et constatent que c’est bien le cas ; toutefois, le rayonnement ultraviolet a tendance à détruire les cellules vivantes...

Cependant, lors de la mission d’Apollo 12, les astronautes récupérèrent des morceaux d’une sonde, Surveyor 3, qui avait atterri deux ans plus tôt. Après une analyse détaillée, on trouva sur la caméra de la sonde une centaine de bactéries Streptococcus mitis qui avaient survécu, sans eau ni nourriture, au vide de l’espace, à ses radiations dangereuses et à ses températures extrêmes (20K) ! Depuis peu, on pense toutefois que la caméra aurait pu être contaminée à son retour. Toutefois, en parallèle, diverses expériences ont été menées et ont montré que certains petits organismes pouvaient résister aux conditions extrêmes de l'espace.

Plus récemment, Fred Hoyle et Chandra Wickramasinghe (1939 -)reprennent l’hypothèse de panspermie, en assurant que l’absorption ultraviolette du milieu interstellaire est due à des virus ou des algues (leur arrivée dans l’atmosphère provoquant des épidémies sur Terre), que la poussière interstellaire est peut-être de la cellulose, ou encore que les explosions récurrentes du nombre de nouvelles espèces correspondent à l’arrivée massive de « semences » spatiales. Allant plus loin encore, Francis Crick (1916-2004) et Leslie Orgel (1927-) proposent une panspermie dirigée – des vaisseaux spatiaux extraterrestres envoyés délibérément pour féconder les planètes... Tout cela ne règle évidemment pas le problème de l’apparition de la vie, reportant le problème de la Terre à une autre planète.

Dans les années 1950, Melvin Calvin (1930-2007) et Stanley Miller (1911-1997) arrivent à produire des substances organiques (acide formique pour le premier, acides aminés pour le second) à partir d’un mélange de gaz « primitifs » (figure 1).

Très vite, ces résultats font l’effet d’une bombe : si l’on arrive à produire ces composés aussi facilement, cela implique que la vie est possible ailleurs ! Les astronomes découvrent d’ailleurs des composés organiques dans le milieu interstellaire voire des acides aminés dans des météorites... Certains assurent même y avoir trouvé des « algues » (Nagy & Claus en 1961 et Mc Kay en 1996 pour ALH84001, figure 2), mais ces résultats sont encore loin d’être confirmés. Tout cela, combiné à la découverte de vie dans les conditions les plus extrêmes de la Terre, pousse certains à l’optimisme : « Il y a aujourd’hui toute raison de penser que l’origine de la vie n’est pas un ‘heureux accident’ mais un phénomène complètement régulier. » (A.I. Oparin en 1975).

Côté théorique, la fin du 19e siècle a vu Charles Darwin (1809-1882) et Alfred R. Wallace introduire l’idée de sélection naturelle. Cette théorie permet d’envisager l’évolution dans d’autres conditions – comme celles régnant sur d’autres planètes, par exemple. Elle pousse au départ à l’optimisme mais il apparaît rapidement que l’évolution de la vie sur Terre ne s’est pas faite de façon très linéaire... Wallace affirme ainsi qu’il a fallu des millions de petites modifications pour arriver à l’Homme – obtenir la même chose ailleurs est donc impossible ; de plus, l’humanité est la seule race intelligente sur Terre – la possibilité d’une intelligence extraterrestre est donc encore plus faible. Beaucoup reprennent ces idées : « L’homme sait enfin qu’il est seul dans l’immensité indifférente de l’Univers d’où il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n’est écrit nulle part. À lui de choisir entre le Royaume et les ténèbres.» (J. Monod en 1970), «La pleine réalisation de la quasi-impossibilité de l’origine de la vie nous rappelle combien cet événement était improbable. » (E. Mayr en 1982). Sans preuves observationnelles, le débat reste actuellement ouvert. Les scientifiques les plus optimistes s’accordent toutefois à dire que « vie extraterrestre » ne rime pas avec « humains » : le chemin évolutif ayant probablement été différent ailleurs, les formes de vie le seront aussi.

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