Pour pouvoir suivre ce cours dans les meilleurs conditions il vous faut maîtriser les bases des domaines suivants :
Dynamique newtonienne, pour comprendre la position et les déplacements de la planète
Optique géométrique, pour comprendre le fonctionnement de la collecte de photons sur un détecteur
Optique ondulatoire, pour pouvoir comprendre le fonctionnement des instruments :
Vous êtes invités à au moins parcourir les liens mis à disposition dans cette page pour pleinement bénéficier de ce cours.
L'imagerie directe d'exoplanètes se propose d'obtenir l'image d'une planète tournant autour d'une autre étoile que le soleil.
L'idée de base est de prendre des photographies comme on le fait pour les planètes du système solaire.
Malheureusement, à cause de leurs distances, il est exclu pour le moment de pouvoir distinguer le disque de n'importe laquelle des exoplanètes connues. Nous les voyons donc comme une source ponctuelle, et de plus, l'image de ce point est déformée par l'optique de l'instrument utilisé.
Les planètes du système solaire sont facilement observables, la plupart le sont même à l'oeil nu ! Et pendant des siècles on les a étudiées uniquement par l'imagerie dans le visible, d'abord à l'oeil nu puis avec des lunettes et des télescopes.
Chercher à faire l'image d'une planète tournant autour de son étoile peut sembler, de prime abord, la meilleure façon de découvrir une exoplanète.
À la différence des méthodes comme la vélocimétrie radiale ou l'étude des transits, l'idée n'est pas ici d'étudier une étoile perturbée par de la présence d'une planète mais bien d'étudier la lumière de la planète elle-même. Cette lumière comprend pour partie la lumière de l'étoile réfléchie par la surface de la planète et, pour partie, de la lumière émise par la planète elle-même.
Une planète possède une luminosité très faible par rapport à son étoile hôte, cette dernière est aveuglante en comparaison !
Et l'on doit pouvoir séparer, sur le détecteur, l'étoile et la planète, très proches l'une de l'autre (8 minutes-lumière pour une planète à une unité astronomique de son étoile) mais toutes deux situées à plusieurs années-lumière de nous !
Les techniques d'imageries directes ont plusieurs buts :
L'imagerie directe permet d'accéder aux planètes situées loin de leur étoile et suffisamment grosses (de masse supérieure à celle de Jupiter). Ces planètes sont difficiles à déteminer par les méthodes indirectes (transits ou vitesses radiales) car elles demandent une étude sur au moins une période orbitale complète, soit plusieurs (dizaines d') années .
Si on arrive à identifier la lumière émise par une planète, et que la quantité de lumière reçue est suffisante, on peut la décomposer par spectroscopie. Cette technique nous permet de déterminer la composition chimique de l'atmosphère de la planète, d'obtenir des informations, comme la température efficace (ou effective temperature en anglais).
Cette technique nous permettra peut être un jour prochain d'identifier la première exo-Terre dotée d'une atmosphère ressemblant à la nôtre...
La formation des planètes et la formation des systèmes planétaires sont des phénomènes encore mal compris, augmenter nos connaissances sur les planètes géantes, jeunes, éloignées de leur étoile, nous permettra de déterminer lesquels parmi les modèles actuels sont valides.
Or les jeunes Jupiter sont justement les cibles privilégiées de l'imagerie directe, voyons pourquoi dans les écrans suivants ...
L'observation par imagerie directe nécessite certaines conditions sur les cibles observables :
C'est en comparant les flux lumineux du Soleil et de ses planètes que l'on peut remarquer au moins deux choses :
Attention : un contraste d'un facteur X correspond à un rapport de !
Comme vous pouvez facilement l'imaginer, pour pouvoir détecter/voir la planète, la différence de luminosité entre l'étoile et la planète doit être aussi faible que possible. Il est donc plus facile de chercher des exoplanète autour d'étoiles peu brillantes.
La luminosité de l'étoile dépend de sa température, cette dernière dépendant de sa masse, et la durée de vie d'une étoile st inversement proportionnelle à cette masse. Suivant sa position dans le diagramme HR (voir ci-dessous) l'étoile évolue donc plus ou moins vite.
Si on cherche à étudier les exoplanètes autour d'une étoile de faible luminosité, on va donc être intéressé par des étoiles de faible masse et faible température, voire même par des naines brunes. Dans les faits, la première exoplanète imagée l'a été autour d'une naine brune.
Mais une planète comme β Pictoris b tourne autour d'une étoile A (blanc-bleutée) de la séquence principale ! Comment se fait-il que l'on puisse imager une planète autour d'une étoile aussi brillante ? Une étoile de type A est très massive, elle quitte donc rapidement la séquence principale. Une étoile A sur la séquence principale est donc jeune, et ses planètes le sont aussi : ainsi β Pictoris a un âge compris entre 10 et 20 millions d'années seulement. Pourquoi est-il intéressant de cibler un système planétaire si jeune ?
Les sources d'énergie permettant à une planète de rayonner peuvent être de deux types :
Comme nous l'avons présenté précédemment, notre problème est similaire à celui d'observer à plusieurs kilomètres de distance la lumière d'une chandelle posée à côté de la lampe d'un phare. Si vous collez la chandelle à la lampe du phare vous n'avez aucune chance de la voir car vous serez totalement éblouis. En revanche, si vous attachez la chandelle à un bras télescopique de plusieurs mètres, vous pourrez la détecter plus facilement.
De plus, si, avec votre bateau, vous vous éloignez trop du phare, vous êtes sûr de ne pas pouvoir observer la chandelle. Pour augmenter les chances d'observer directement une exoplanète, il faut donc que la séparation apparente entre l'étoile et l'exoplanète sur le ciel soit aussi grande que possible, ce qui nécessite :
Dans les écrans qui suivent vous trouverez quelques exemples d'instruments qui sont utilisés ou vont être utilisés dans un proche avenir pour imager les exoplanètes. Cette liste est loin d'être exhaustive mais se veut constituée d'exemples concrets d'instruments dédiés ou non à cette technique.
En premier lieu nous présentons deux satellites dont les archives (observations anciennes) regorgent peut-être de planètes à découvrir (avis aux amateurs) :
De nombreux concepts de satellites dédiés à l'imagerie directe ont été développés, que ce soit par coronographie ou interférométrie, à l'instar de SPICES, Darwin ou TPF. Les développements techniques pour permettre la réalisation de ces missions sont en cours au moment où sont rédigées ces lignes.
Les deux instruments au sol que nous présentons ici sont des instruments européens (contrairement à Hubble et Spitzer qui sont pour leur part américains). Il s'agit de NaCo et de SPHERE.
Ce second instrument, SPHERE, fait partie d'une génération d'instruments pour grands télescopes qui comprend, entre autres, le Projet 1640, MagAO et GPI . L'arrivée de tous ces instruments, pour la plus part dédiés à l'imagerie directe d'exoplanètes, promet une moisson de découvertes dans les prochaines années.
Le télescope spatial Hubble (Hubble Space Telescope, HST en anglais) de la NASA est une des sources d'images d'exoplanètes. Son principal point fort est de se trouver hors de l'atmosphère et donc d'atteindre un pouvoir de séparation angulaire permettant la détection de l'exoplanète.
Remarque : nous verrons comment l'on tente de corriger les perturbations causées par l'atmosphère terrestres pour les instruments situés au sol, dans la partie sur l'optique adaptative.
Pour l'imagerie directe on utilise ACS (pour Advanced Camera for Surveys) qui possède un coronographe, permettant de masquer la lumière d'une étoile pour voir seulement celle provenant des planètes situées autour (voir suite du cours). Cette caméra, installée en 2002, est la plus utilisée pour l'imagerie astronomique en général. L'autre instrument utilisé est STIS (pour Space Telescope Imaging Spectrograph) qui nous donne par exemple l'image ci-dessous.
Un exemple de détection par HST : Fomalhaut b. Cette planète a été annoncée par Paul Kalas, James R. Graham et collaborateurs en 2008 dans la revue Science, autour d'une étoile âgée de 400 millions d'années et située à 7,7 pc de nous. Une non-détection par un autre satellite a jeté un doute sur son existence (voyez la page suivante)...
Un autre satellite jouant un rôle important dans l'imagerie directe d'exoplanètes est le télescope spatial Spitzer. C'est le télescope spatial spécialisé dans l'infrarouge de la NASA, il est utilisé dans notre cas pour vérifier la présence de planètes ou pour contraindre leur rayon et leur masse.
C'est l'instrument IRAC (InfraRed Array Camera), qui est utilisé dans une de ses bandes dans le proche infrarouge pour rechercher les jeunes exoplanètes géantes.
Certains chercheurs expliquent la non-détection par Spitzer de Fomalhaut b (voir la page précédente sur HST) par le fait que la planète serait de faible rayon. Dans ce cas, Spitzer nous donne une limite sur le rayon maximal de la planète.
NaCo est un instrument du Very Large Telescope (VLT) de l'Observatoire Européen Austral (ESO en anglais), il a permis de faire la première image d'une exoplanète confirmée en 2005 par Gaël Chauvin, Anne-Marie Lagrane et collaborateurs.
Son nom vient de la fusion de NAOS et de CONICA, qui sont respectivement un système d'optique adaptative (Nasmyth Adaptive Optics System) et un imageur, polarimètre, coronographe et spectrographe dans le proche infrarouge (Near-Infrared Imager and Spectrograph) et est utilisé par de nombreuses communautés d'astronomes.
Spectro Polarimetric High contrast Exoplanet REsearch (SPHERE) est un instrument de seconde génération du VLT, il doit permettre d'obtenir le spectre des planètes cibles et d'étendre le nombre de planètes étudiées en imagerie directe. Il conjugue une optique adaptative de pointe, la coronographie et l'imagerie différentielle spectrale, polarimétrique et angulaire. Ces concepts vont vous être présentés dans ce cours.
Pour conclure cette partie d'introduction sur le sujet de l'imagerie directe des exoplanètes, voici deux exemples de systèmes planétaires, confirmés et étudiés.
Autour de l'étoile HR 8799 se trouve un système d'au moins 4 planètes géantes plus massives que Jupiter, c'est une étoile jeune (moins de 100 millions d'années), chaude (7230 K de température efficace) et plutôt proche de nous (40 pc).
Ce système de planètes nous permet de rappeler ici la nomenclature utilisée actuellement pour nommer une exoplanète : on commence par le nom de son étoile hôte suivi d'un lettre minuscule partant de "b", les lettres étant distribuées dans l'ordre de découverte des exoplanètes qui ne correspond pas forcément avec un ordre de taille ou de distance à l'étoile hôte. Ainsi, HR 8799 e a été la dernière à être découverte car la plus proche de son étoile et donc la moins facilement séparable.
Autour de la jeune (20 millions d'années) et chaude (8040 K de température efficace) étoile β Pictoris tourne la planète β Pictoris b, située à seulement 20 pc (60 années-lumière) de nous. C'est un jeune Jupiter massif qui perturbe le disque de gaz et de poussières gravitant autour de son étoile.