Les sondes électrostatiques utilisées pour les missions spatiales sont basées sur des techniques de laboratoire développées et présentées par Irving Langmuir et ses collègues au milieu des années 1920. Ce n'est seulement qu'à partir de la fin des années 1950 que ce type de technique a été utilisé sur des fusées et satellites pour mesurer la densité des ions et des électrons ionosphériques, la température électronique et le potentiel du satellite.
La technique des sondes de Langmuir consiste à mesurer le courant collecté par la sonde lorsque l'on fait varier la tension apliquéee à celle-ci. Une sonde électrostatique est une électrode conductrice de taille et forme appropriées qui est insérée dans le plasma (pour les plamas spatiaux la sonde se trouve sur au bout d'un mât du satellite). La tension sur l'électrode varie par rapport à une électrode de référence et le courant collecté est mesuré. L'analyse de la réponse ''tension-courant (U-I)'', appelé caractéristique va permettre de déterminer les propriétés du plasma : sa densité électronique , sa température électronique , la masse moyenne des ions et la densité des ions , ainsi que le potentiel du satellite.
Une théorie simple de la sonde de Langmuir [Mott-Smith and Langmuir, 1926] montre que l'amplitude du courant électronique , est proportionnel à , et que l'amplitude du courant ionique est proportionnel à . Le courant pour des potentiels répulsifs est proportionnel à l'exponentielle de la tension divisée par la température :
On fait varier le potentiel appliqué à la sonde par rapport au satellite et on collecte le courant sur la sonde. Le courant est la somme des courant ionique et électronique générés par les particules impactant la sonde. La figure de cette page illustre une représentation schématique d'un courant collecté par une sonde de Langmuir sphérique (celle de Cassini). Il est possible d'identifier différentes régions. Lorsque ( étant le potentiel du plasma) les électrons sont accélérés et les ions sont freinés. Dans le cas inverse () les électrons sont repoussés et les ions accélérés. L'échantillonnage de la fonction de distribution des électrons en fonction du potentiel appliqué à la sonde est schématisé grâce à l'appliquette disponible à la page suivante.
Cette technique est une mesure active, c'est-à-dire qu'elle pertube le milieu qu'elle mesure. Ainsi l'insertion de la sonde va modifier le plasma. Lorsque la sonde n'est pas présente le plasma a localement une densité , une température , une densité ,... Lorsque la sonde est présente, la tension appliquée à la sonde va collecter les courants liés aux déplacement des charges électriques (ions et électrons). Du fait de la plus grande mobilité des électrons (moins massifs que les ions), les électrons vont impacter la sonde plus rapidement ce qui va créer une structure de potentiel autour de la sonde. Du coup un électron qui se trouve loin de la sonde et de sa structure de potentiel verra un potentiel différent que celui appliqué à la sonde à cause de cet écrantage. Cette région s'appelle la gaine et l'équilibre de charge entre ions et électrons est brisé.
On appelle sonde électrostatique, ou sonde de Langmuir, un conducteur de petite dimension, plongé dans le plasma à étudier, polarisé électriquement et qui collecte les particules chargées du plasma. Au voisinage de la sonde se forme une gaine que l'on décrira rapidement par la suite.
La théorie classique des sondes électrostatiques repose sur les hypothèses suivantes :
Les électrons ont une distribution des vitesses de Maxwell-Boltzmann (dite maxwellienne)
Le nombre d'électrons par unité de volume, dont le vecteur vitesse est compris entre et est ainsi égal à :
en système de coordonnées cartésiennes.
Considérant que le plasma est électriquement neutre et équipotentiel localement, on peut définir un potentiel qui correspond à l'ensemble des espèces du plasma : le potentiel plasma . On notera la tension appliquée à la sonde, et cette même tension mesurée par rapport au potentiel plasma.
Le calcul est ici développé pour le cas d'une sonde à symétrie plane, utilisant un système de coordonnées cartésiennes où l'axe est normal au plan de la sonde. Les calculs dans le cas d'une géométrie sphérique sont proposés en exercice. On notera
On définit le flux comme le nombre de particules par unité de surface et par unité de temps. Le flux de particules qui arrive à la surface de la sonde est égale à :
soit
Ce calcul suppose que tous les électrons sont collectés et que leurs vitesses ne sont pas modifiées au voisinage de la sonde. Si la sonde est polarisée à un potentiel négatif (), seuls les électrons ayant une vitesse telle que : seront collectés, par contre tous les ions sont collectés.
Le courant électronique s'écrit alors : Ici, est la valeur absolue de la charge unitaire et la surface de la sonde.
Par intégration, où est le courant lié aux vitesses thermiques des particules. Le courant électronique est négatif à cause de la charge de l'électron.
La relation obtenue peut s'exprimer en fonction de la vitesse moyenne des électrons : Le courant électronique s'écrit donc également :
Pour (i.e. une tension sonde égale au potentiel plasma) tous les électrons sont collectés. Pour (c'est-à-dire ), le courant est le même car tous les électrons sont collectés. Le courant électronique est alors constant et égal à : On montre alors que pour , .
Pour , tous les ions sont collectés et on devrait obtenir un courant ionique de saturation constant égal à :
Cependant la présence d'une gaine autour de la sonde modifie la valeur du courant ionique de saturation. Pour , les ions sont repoussés et seuls ceux dont la vitesse est suffisante pourront être collectés comme on l'a montré pour les électrons.
Le plasma est supposé électriquement neutre en volume. Lorsque la sonde est polarisée elle attire les particules chargées : tous les électrons si et tous les ions si . Afin de conserver la neutralité électrique du plasma il se crée, au voisinage de la sonde, une charge d'espace appelée ''gaine''. Les particules de même polarité que le potentiel de la surface sont exclues de cette gaine. Cette gaine est électronique si (afin de limiter le flux d'électrons) et ionique si (pour limiter le flux d'ions). L'épaisseur de cette gaine est de l'ordre de grandeur de la longueur de Debye :
La solution exacte de la distribution du potentiel électrostatique est un problème aux conditions aux limites très compliqué qui ne peut être résolu que dans certaines géométries simples (sphère, cylindre ou plan).
On peut noter que les objets de taille finie introduits dans un plasma ayant des températures ioniques et électroniques approximativement égales acquièrent en général une charge négative car la vitesse des électrons est beaucoup plus grande que la vitesse thermique des ions , et de ce fait plus d'électrons viennent frapper l'obstacle. Comme cet objet se charge négativement, les électrons sont repoussés. L'équilibre s'obtient lorsque le courant électronique collecté à la surface de l'objet (la sonde) vient équilibrer le courant ionique incident ce qui se produit pour une certaine valeur de potentiel que l'on appelle le potentiel flottant.
Le courant collecté par la sonde est la somme algébrique des courants électroniques et ioniques, . Les paramètres plasmas et sont déterminés à partir du courant électronique . Pour avoir accès au courant électronique, il faut éliminer la contribution du courant ionique du courant total mesuré. La figure U-I représente en fonction de .
L'analyse de la caractéristique tension-courant permet de déterminer quelques propriétés du plasma telles que la densité électronique et ionique, la température électronique ,... En se limitant à la théorie la plus simple (sans prendre en compte les effets de gaine), il est possible de trouver des expressions théoriques ci-dessous :
L'appliquette du lien suivant présente une observation de la sonde de Langmuir de Cassini (point rouge) et le résultat d'un ajustement d'une courbe théorique pour les paramètres d'entrées (, ...) à spécifier par l'utilisateur.
Dans le cas des sondes de Langmuir embarqués sur des missions spatiales, d'autres termes de courant contribuent au courant total. En particulier les photoélectrons du satellite ont une contribution non-négligeable dans le courant total. Ces photoélectrons sont les électrons arrachés du satellite (qui est composé de parties conductrices) lors de l'interaction entre le plasma et la sonde spatiale. Il existe d'autres contributions comme le courant des particules énergétiques ou le courant lié aux impacts de poussières (ou plasma poussiérieux) présentes dans l'espace.
Pour approfondir, nous recommandons les lectures suivantes :
Pour illustration nous prenons comme exemple le spectromètre électronique embarqué sur la mission Spatiale Cassini. Plus d'informations sont disponibles dans le papier de description instrumentale Young et al, Space Science Reviews, ..., 2004. Ce spectromètre a été construit par le Mullard Space Science Laboratory, Angleterre.
Un schéma simplifié de l'instrument est présenté à la figure suivante. Cet instrument est essentiellement un analyseur électrostatique hémisphérique de type 'top-hat' (en référence au fait qu'une petite section d'analyseur se trouve placée au dessus des électrodes de déflection).
Les électrons entrent dans le senseur via une des huit fenêtres d'entrées qui consiste en un baffle collimateur (les huit fenêtres définissent le champ de vue de l'instrument, c'est-à-dire sa couverture angulaire ). Ces électrons sont ensuite dirigés dans l'analyseur électrostatique jusqu'au détecteur, qui dans le cas du spectromètre électronique de Cassini sont des galettes micro-canaux. Ces galettes permettent la détection des particules chargées. La sélection en énergie s'effectue dans l'analyseur électrostatique. L'analyseur consiste en deux plaques/électrodes ayant pour l'une un potentiel nul et pour l'autre un potentiel que l'on applique. Le champ électrique entre les deux électrodes exerce une force sur la particule qui va dévier la trajectoire lorsque celle-ci entre dans l'entrefer (espace entre les deux électrodes). Les particules atteignent les détecteur lorsque le rapport correspond à la force générée par le champ. En faisant varier le potentiel de l'électrode, il est possible de parcourir différentes gammes d'énergie. Les mesures présentent donc un spectre d'énergie. En analysant ce spectre, et en combinant les informations sur la couverture angulaire, il sera possible de reconstruire la fonction de distribution des électrons.
L'appliquette \ref{appliquette_analyseur_electrostatique} présente brièvement le mode de fonctionnement d'un analyseur électrostatique et la trajectoire d'un électron pour une énergie incidente fixée par l'utilisateur. Les potentiels des deux électrodes ont été fixés (valeurs non connues de l'utilisateur) et il s'agit de déterminer la bande passante en énergie.
Nous présentons deux cas simples d'analyseur électrostatique :
Les analyseurs sphériques ou hémisphériques sont des extensions naturelles de ces deux types d'analyseurs et ne présentent pas de concepts différents, seuls les calculs sont un peu plus compliqués.
Pour illustrer la théorie qui se cache derrière le fonctionnement d'un analyseur électrostatique nous prendrons le cas d'un analsyeur à électrodes parallèles (cf Figure). Notons que ce genre d'instrument n'a pas été embarqué à bord de missions spatiales et est utilisé juste dans le cadre d'explication du concept sur une géométrie simple.
Un analyseur électrostatique à électrodes parallèles consiste en deux électrodes séparées par une distance . Une des deux électrodes est reliée à la masse tandis que l'autre électrode est fixé à un potentiel ( pour la détection des électrons, pour la détection des ions). Les particules entrent par un orifice d'entrée positionné en avec une vitesse et un angle par rapport aux électrodes. Les particules voient un champ électrostatique constant qui va modifier leur trajectoire. Les particules vont ensuite impacter le détecteur situé à une distance de l'orifice d'entrée. Le schéma suivant illustre le montage.
Il est possible de décrire analytiquement la trajectoire d'une particule de charge dans ce système. Nous présentons ici uniquement les résultats et les cacluls pourront être fait dans le cadre d'un exercice (cf exercice ). Les équations paramétriques décrivant la trajectoire sont :
En notant l'énergie cinétique initiale de la particule (à l'entrée du système), il est possible de relier la distance du détecteur () à l'énergie.
A partir d'un simple calcul d'incertitude il est possible de montrer que la résolution relative en énergie dépend de la position du détecteur et de sa largeur.
Ainsi en balayant le potentiel appliqué à l'électrode on pourra couvrir différentes gammes d'énergie et reconstruire la fonction de distribution en énergie.
Un autre analyseur électrostatique simple a une géométrie cylindrique. Cet analyseur est constitué de deux secteurs cylindriques concentriques (cf Figure). Ce type d'analyseur a été utilisé lors de la mission spatiale Mariner 2. Cet analyseur a entre autre permis de fournir la confirmation expérimentale d'un vent solaire continu et de déterminer ses propriétés élémentaires [Snyder and Neugebauer, 1962].
À cause de la géométrie cylindrique, seules les particules avec une vitesse parallèle à la normale du plan d'entrée de l'analyseur peuvent entrer dans celui-ci. Or avec une largeur de l'entrefer, des particules avec une composante non nulle suivant le plan d'entrée de l'analyseur peuvent également se propager jusqu'à la sortie. Cela a pour conséquence d'augmenter la gamme d'énergie car les particules entrant dans l'analyseur avec un angle important par rapport à la normale peuvent être sélectionnées quand bien même leur énergie totale peut se trouver en dehors de la gamme d'énergie filtrée.
Dans ce genre de montage l'énergie de la particule reste constante. La force radiale est équilibrée par la force électrique et la particule chargée est maintenue sur une trajectoire circulaire de rayon
où est l'énergie cinétique de la particule, et sont les potentiels appliqués aux deux électrodes.
L'analyseur sélectionne les particules ayant une énergie
La constante de l'analyseur K, également appelé la sensibilité de déflection, est le rapport entre l'énergie (en eV) de la particule qui passe dans l'analyseur et la tension appliquée entre les deux électrodes séparées de la fente de sortie d'une distance . La bande d'énergie des particules qui passent à travers l'analyseur vaut : Une extension naturelle des analyseurs à secteur cyindrique à deux dimensions est de former des analyseurs à secteurs sphériques et les analyseurs électrostatiques hémisphériques ''top-hat''.
La spectrométrie de masse utilise le rapport masse sur charge () pour séparer les atomes et molécules ionisés. La spectrométrie de masse est l'une des techniques analytiques les plus sensibles et est fréquemment utilisée pour déterminer les propriétés du plasma. Le spectre de masse contient des informations sur la composition élémentaire (présence et nombre de certains éléments), l'abondance isotopique (la masse exacte) et la structure (les fragments).
Un spectromètre de masse se compose en deux parties, une source qui va ioniser le gaz et un analyseur qui va permettre la détermination des masses qui composent le mileu (en fait des rapport ). Dans le domaine spatial, le plasma est le milieu d'étude et la source d'ionisation n'est généralement pas nécessaire (sauf si on souhaite caractériser les atmosphères neutres planétaires). L'instrument se réduit donc à la partie analyseur.
Il existe différentes classes d'analyseur permettant de donner la masse des particules. Nous nous limiterons à une description succincte du fonctionnement de base de deux analyseurs :
Un analyseur magnétique sépare les rapports basés sur la déviation des trajectoires de particules ionisés dans un secteur magnétique. Dans le secteur magnétique, la trajectoire des ions est plane et est située dans le plan perpendiculaire à . La trajectoire est circulaire avec un rayon .
Connaissant la tension d'accélération des particules à l'entrée de l'analyseur, la zone d'impact sur le détecteur permet d'obtenir la masse de la particule.
Le schéma présente l'analyseur d'ions IMA (Ion Mass Anaylzer) embarqué sur les missions Mars Express et Venus Express. On identifie un déflecteur électrostatique (partie du haut) qui va permettre d'avoir une acceptance angulaire des faisceaux d'entrée plus importante, un analyseur électrostatique de type ''top-Hat'' étudié précédemment, un analyseur magnétique où les trajectoires de différentes espèces (masses) ioniques illustrent les différentes zones d'impact du détecteur.
Lorsque les particules chargées entrent dans l'analyseur, elles se trouvent dans un milieu avec un champ magnétique uniforme et statique . Le mouvement d'une particule non-relativiste dans un tel champ est donné par :
où est la force de Lorentz. En prenant le produit scalaire de l'équation ci-dessus avec le vecteur vitesse, nous obtenons
Ce qui montre que l'énergie cinétique est une constante du mouvement. Pour déterminer la trajectoire il est avantageux de séparer les composantes des vitesses parallèle et perpendiculaire au champ magnétique. Soit
L'énergie cinétique peut également se décomposer en une contribution parallèle et une autre perpendiculaire, où et . Comme la force n'a pas de composante parallèle au champ magnétique, la composante parallèle de la vitesse est constante, donc la particule se déplace avec un vitesse constante le long du champ (sauf si ). Puisque et sont constants alors (et de ce fait ) sont également des constantes du mouvement.
Le rayon de courbure du mouvement de la particule dans le plan perpendiculaire à peut s'écrire (en ignorant le signe) : Le rayon est souvent appelé le rayon de Larmor
Si les ions entrant dans le secteur magnétique sont initialement passés par un analyseur électrostatique (seules les particules avec une énergie sélectionnée peuvent sortir de l'analyseur) alors les ions ont une énergie donnée ( est la tension d'accélération utilisé dans l'analyseur électrostatique). La vitesse des ions vaut donc On obtient ainsi la mesure de masse sur charge :
Les ions avec différents rapports de masse sur charge auront des rayons de Larmor différents et auront des zones d'impact sur le détecteur différentes.
Un analyseur à temps de vol est également appelé ''Time of Flight'' ou ''TOF''. Cet analyseur repose sur le principe de détermination du temps de vol des particules qui entrent dans l'analyseur. Pour une particule à une énergie connue , on mesure le temps que la particule met pour effectuer la distance entre la source et le détecteur. Connaissant le temps de parcours et la distance parcourue, on en déduit la vitesse. Comme l'énergie de la particule est déterminé on peut en déduire sa masse.
Par exemple pour une même énergie de départ deux particules de masse auront des vitesses telles que . C'est-à-dire que la vitesse de la particule légère () sera plus grande que la vitesse de la particule lourde (). Comme les deux particules ont parcouru la même distance on trouve que le temps de parcours de la particule légère sera plus bref que celui de la particule lourde .
avec un potentiel de post-accélération et l'énergie perdue lors de collision à travers une feuille de carbone (cf ci-dessous). Soit
Prenons comme illustration le spectromètre à temps de vol de l'instrument CAPS sur Cassini (cf figure). Dans ce schéma, tout comme celui de l'analyseur de Mars Express, les particules passent d'abord par un analyseur électrostatique type top hat avant de rentrer la partie de l'analyseur en masse. Cet analyseur en masse est représenté par la cavité se situant après l'analyseur électrostatique ou un champ électrique quasi-linéaire est présent. Un détecteur se trouvant au bas de l'instrument (ST) se trouve dans une région où le potentiel est proche de +15kV (les particules chargées négativement viendront principalement impacter ce détecteur), le détecteur se trouvant au dessus (LEF) est situé dans une région où le potentiel est proche de -15kV (seul les ions positifs peuvent impacter ce détecteur).
Le principe de fonctionnement est le suivant :
On se place dans un cas de figure simple d'un analyseur à temps de vol linéaire (Wiley and McLaren, 1955). Le montage est présenté à la figure suivante. On applique une tension d'accélération connue. La vitesse de la particule est liée à cette tension d'accélération (l'énergie potentielle électrostatique est transformée en énergie cinétique) Dans la région de champ libre, l'énergie de la particule n'évolue pas. Le temps pour parcourir la distance est lié à sa vitesse .
Soit On en déduit le temps de vol
Le mouvement des particules chargées est contraint par le champ magnétique, de ce fait, une connaissance des variations spatiales et temporelles du champ magnétique est primordiale. Les magnétomètres ont été largement utilisés à bord de missions spatiales d'exploration terrestres et planétaires. Nous nous intéressons ici aux mesures de champ magnétique continu obtenu à l'aide d'un magnétomètre de type magnétomètre à vanne de flux, également appelé fluxgate. Les mesures des fluxgate peuvent également fournir des informations sur les ondes basses fréquences.
Le principe de mesure du fluxgate repose sur une application directe de la loi de Lenz. La variation du flux champ magnétique à travers spires induit une tension électrique : On rappelle que le flux du champ d'induction magnétique traversant une surface fermée est , où est un vecteur élémentaire de surface.
L'autre principe de fonctionnement d'un fluxgate est basé sur les caractéristiques de saturation non-linéaire d'un matériau ferromagnétique.
Un fuxgate est donc constitué d'un tore en matériau ferromagnétique sur lequel on place deux bobinages :
Une représentation schématique d'un fluxgate est illustrée sur la figure suivante.
L'ensemble doit servir à mesurer la direction et l'amplitude du champ magnétique . Le bobinage d'excitation a pour effet de saturer le matériau magnétique périodiquement à la fréquence fondamentale (une dizaine de kHz). Le bobinage d'excitation crée un champ alternatif dans le matériau ferromagnétique. L'induction générée est limitée par la saturation du matériau. Le second bobinage est utilisé comme élément de détection et est appelé sense winding ou bobinage de mesure. À ces bornes, une tension est induite par la variation temporelle du flux magnétique total.
Dans le schéma précédent le tore a été séparé en un demi-tore de couleur bleue et un demi-tore de couleur verte. Lorsque le vecteur se trouve dans le plan du tore, on va pouvoir déterminer sa direction. Lorsque le courant traverse le bobinage d'excitation, la moitié va générer un champ avec une composante dans la même direction que et l'autre moitié dans la direction opposée.
Lorsque le champ externe est nul (), les deux demi-tores entrent dans la région de saturation (cf figure ) en même temps. Les champs générés s'annulent (le champ du tore vert vient annuler le champ du tore bleu). Il n'y a pas de changement de flux magnétique et donc de courant n'est induit qui peut être mesurer par le second bobinage.
En présence d'un champ externe, le tore générant un champ magnétique dans la direction opposée au champ externe (le demi-tore vert) sort de la région de saturation avant le demi-tore orienté dans la même direction que le champ externe. Pendant ce lapse de temps les champs ne s'annulent pas, et créent une variation de flux magnétique qui induira une tension induite dans la bobine de mesure.
L'électronique de mesure permet d'extraire la valeur du champ magnétique du signal mesuré à travers le bobinage de mesure. L'application d'un champ magnétique continu provoque l'apparation d'harmoniques pairs dans la tension induite en raison du comportement non-linéaire du matériau magnétique. On extrait l'amplitude et la phase pour déterminer l'amplitude et la direction du champ. On utilise la mesure du champ magnétique d'induction qui est contenue dans les harmoniques du signal. Le second harmonique est généralement utilisé.
Les matériaux réagissent au champ magnétique de manière différente en fonction de leur propriété magnétique. Sous l'effet d'un champ magnétique, un matériau peu s'aimanter. Cette aimantation est liée au champ magnétique d'excitation par la relation où et sont respectivement la susceptibilité et perméabilité magnétique ().
Les matériaux ferromagnétiques possèdent une caractéristique présentée à la figure précédente, où est le champ d'induction magnétique (en T) et est le champ magnétique (en ).
Le champ magnétique d'induction , le champ magnétique et l'aimantation sont reliés par la relation :
Une applet Java illustrant et expliquant le phénomène d'hystérésis est disponible sur le site suivant
Par ailleurs, lorsque la géométrie du corps ferromagnétique est différente de la topologie du champ magnétique, une interaction magnétostatique apparaît qui contrarie l'aimantation du corps ferromagnétique. Il s'agit de l'effet démagnétisant. Le champ démagnétisant a la même direction que le champ qui lui a donné naissance mais est de sens opposé : où est le coefficient démagnétisant.
En combinant les expressions précédentes on peut exprimer une relation entre champ d'induction magnétique apparent et le champ d'induction externe au noyau où est la perméabilité apparente (tenant en compte l'effet démagnétisant). On rappelle que la perméablité magnétique du matériau est une fonction du champ magnétique : .
En utilisant la loi de Lenz, la tension électrique induite dans le bobinage secondaire est donnée par (si est constant). Soit, en utilisant l'expression de déterminée précédemment : Il s'agit de l'équation basique des magnétomètres à vanne de flux.
La courbe caractéristique présentée à la figure suivante peut être modélisée par une fonction polynomiale du troisième ordre
où le champ magnétique comprend à la fois le champ externe à mesurer et le champ ''interne'' induit par le courant imposé dans le bobinage d'excitation ().
Si on impose un courant sinusoïdal au bobinage d'excitation de la forme , on induit un champ magnétique de la forme sinusoïdale
La tension induite dans le bobinage secondaire (le bobinage de mesure) vaut donc
en remplaçant par son expression , et en développant puis en linéarisant les fonctions trigonomériques, on montre (après quelques lignes de calculs laissées à la discrétion du lecteur) que la tension induite peut s'écrire :
On identifie un terme modulé en qui dépend de , la deuxième harmonique (de fréquence ). On cherchera donc à extraire cette information. D'autres harmoniques peuvent être présentes (dans cette démonstration nous avons modélisé la courbe par un polynôme de troisième degré, si l'on considère un polynôme de degré plus élevé d'autres harmoniques apparaîtront dans les calculs).
Les magnétomètres à vannes de flux, ou fluxgate, utilisent les propriétés des matériaux ferromagnétiques pour mesurer un champ d'induction externe. Le système consiste en un tore ferromagnétique entouré d'un premier bobinage parcouru par un courant d'intensité sinusoïdale (ou triangulaire). Ce courant génère un champ magnétique qui va s'ajouter au champ externe à mesurer. De façon liée à la géométrie du système, une partie du champ généré va avoir une composante parallèle au champ externe, l'autre anti-parallèle. Cette différence de champ va provoquer une variation de flux magnétique et induira une tension induite dans un deuxième bobinage. Cette tension induite contient les harmoniques de la tension d'excitation. Le filtrage de la seconde harmonique permet de retrouver l'information sur le champ externe à mesurer.
Pour approfondir le sujet nous recommandons les lectures suivantes :